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Lazare médecin atypique

Lazare médecin atypique

c'est la deuxième vie de mon blog Alceste médecin atypique , après une fracture de vie , revenu du royaume des morts , et devant l'entrée de la vallée des ombres mon regard a nécessairement changé


Vocation,

Publié par anton ar gwillou sur 24 Janvier 2016, 12:05pm

Catégories : #société

Ambroise Paré, est mon maître à penser en matière de médecine. Père de l’éthique médicale il disait « je soigne les pauvres comme des rois » et aussi : «  guérir parfois, soulager souvent, consoler toujours ».Lui aussi était un médecin atypique .En réalité, il n’était pas médecin, il n’était que Barbier, et de basse extraction. Devenu chirurgien du Roi, il lui a été demandé de passer son doctorat. Hélas, il ne connaissait pas le Latin. On le prépara pour sa soutenance, mais il échoua, alors le roi décréta qu’il était reçu ! Quel pied de nez à la caste médical ! C’est l’inventeur de la ligature chirurgicale à une époque où l’on ne connaissait pas la circulation du sang. Il a mis au point cette technique pendant les guerres d’Italie, horrifié par la façon dont on cautérisait les amputations, souvent avec le décès de l’opéré. Il a créé la première école de sage-femme .Il est natif de Laval, où il a son musée, ville qui m’est très chère, c’est celle de mon adolescence, de mes premières amours, et j’ai fait une partie de ma scolarité précisément au lycée Ambroise Paré.

Ambroise Paré, est mon maître à penser en matière de médecine. Père de l’éthique médicale il disait « je soigne les pauvres comme des rois » et aussi : « guérir parfois, soulager souvent, consoler toujours ».Lui aussi était un médecin atypique .En réalité, il n’était pas médecin, il n’était que Barbier, et de basse extraction. Devenu chirurgien du Roi, il lui a été demandé de passer son doctorat. Hélas, il ne connaissait pas le Latin. On le prépara pour sa soutenance, mais il échoua, alors le roi décréta qu’il était reçu ! Quel pied de nez à la caste médical ! C’est l’inventeur de la ligature chirurgicale à une époque où l’on ne connaissait pas la circulation du sang. Il a mis au point cette technique pendant les guerres d’Italie, horrifié par la façon dont on cautérisait les amputations, souvent avec le décès de l’opéré. Il a créé la première école de sage-femme .Il est natif de Laval, où il a son musée, ville qui m’est très chère, c’est celle de mon adolescence, de mes premières amours, et j’ai fait une partie de ma scolarité précisément au lycée Ambroise Paré.

Le commun imagine que les médecins ont la vocation ? Après trente ans d’exercice, je m’interroge sur ce point .Il est vrai que j’ai l’art de poser les mauvaises questions. Certes on peut estimer que nombre de médecins ont cette vocation ,qu'ils ont parfois un bel humanisme , mais j’ai quelque fois le sentiment que ce n’est pas vraiment une caractéristique établie et le doute pointe son nez.

Pour entamer cette réflexion il faut observer comment lors du concours de médecine les futurs médecins sont recrutés.

Ce concours est le plus socialement inégalitaire qui soit. Ceux qui peuvent s’y inscrire ont déjà été sélectionnés, car issus des filières scientifiques élitistes du système éducatif français, le plus socialement sélectif d’Europe. L’ascenseur social n’y existe plus , seul un environnement familial et sociétal , ainsi que les moyens financiers qui vont avec , permet à la futur élite de suivre certaines filières fléchées , dans certains lycées privés ou publiques , par le biais de matières sélectives comme les langues ( allemand , latin , et maintenant chinois )les mathématiques . D’emblée se présente une Elite sociale, peu d’élu des classes populaires.

Mais c’est là que les choses sérieuses commencent. Ce concours est particulièrement injuste car de nombreux chausses trappes sont là pour faire chuter les candidats qui n’ont pas la logistique nécessaire, c’est-à-dire deux conditions essentielles : le milieu social favorisant, et l’argent. Le milieu permet au candidat d’être formaté pour accepter le sacrifice et les contraintes hors normes de deux années d'ascèse total, mais l’argent le libère de toute contrainte matériel et offre des conditions de travail confortables, un appartement, un moyen de locomotion, aucun souci d’argent de poche, et surtout le moyen de s’offrir les fameuses « conf » payantes qui donnent les clés et les secrets de la réussite, remplissant par la même occasion les poches de certains PH .

Mais ce n’est pas tout : l’ambiance est faite pour décourager les innocents qui auraient eu l’impudence d’essayer : l’enseignement en amphi est souvent (volontairement ?)peu performant pour communiquer à l’étudiant les connaissances nécessaires ; la taille des amphi rend difficile le partage de l’information et, les cours sont systématiquement sabotés par les redoublants. Dans ces conditions Tout tient du secret et du réseau : les bons livres, les bons « poli » ,et surtout les bonnes « conf » , enseignement parallèle pour initiés ayant les moyens, cette fois ci efficace et personnalisé en petit groupe .C’est là aussi qu’intervient l’appartenance familiale à ce même monde , car le parent médecin va donner la carte secrète du parcours , et surtout le carnet d’adresse .

Au bout du compte la sélection sera d’abord social, et plus grave les matières clés de cette première année n’ont rien à voir avec la médecine, ce sont les matières scientifiques comme les mathématiques, les statistiques et autres. Avoir la vocation est presque un handicap.

Mais ce n’est pas fini, une autre élite va se dégager de la masse des postulants : les spécialistes !

A mon époque, un concours ultra sélectif permettait seul d’atteindre le graal. Là encore un solide entourage social et familial, ainsi que les moyens financiers ad hoc , s’avérait indispensable pour réussir tout en poursuivant le tronc commun . Là encore les « conf » rémunérées. Maintenant ce concours a été supprimé pour un examen classant, les mieux classés choisissant les meilleures spécialités, c’est-à-dire celle qui ont un certain aura et ont pourrait remarquer aussi que ce sont celles qui sont les plus rémunératrices. Mais les « conf » sont toujours là !

Que viennent chercher les candidats, qui justifie un tel investissement ? Il y aura toujours des médecins qui, la vocation chevillée au corps, feront ce parcours sans autre motivation que l’exercice d’une belle médecine conforme à leurs aspirations.

Pourtant La certitude d’appartenir à une aristocratie sociale et de s’assurer une vie matériellement confortable par le biais de l’argent pourrait peut-être bien intervenir, sans nier le fait que la médecine ouvre d’autres portes, la politique par exemple.

De la même façon, on a parfois le sentiment que la médecine a un rapport fortement marchand par le biais de la rémunération à l’acte. A cet égard on ne peut s’empêcher de s’interroger sur le sens de la levée de bouclier à la suite de la loi sur le tiers payant, même si des arguments de complexification administrative sont avancés.

Pour s’en convaincre il suffit de constater les dépassements d’honoraires quasi systématiques maintenant, rendant l’accès aux soins, parfois impossible pour toute une classe. Il suffit de se heurter dans le service publique au système des consultations privées qui offre un rendez-vous rapide , voir les actes privés et personne ne pourra le nier, de façon heureusement marginale , la pratique parfois de dessous de table ; à cet égard l’APHP a récemment défrayé la chronique quand un chirurgien a failli être licencié pour une telle pratique .Même si tout cela ne peut être généralisé .

Il faut bien comprendre ce que cela représente d’avoir des lits privés, pratique heureusement rare : cela veut dire que dans un service publique, le personnel qualifié, le plateau technique (bloc et logistique) l’hôtellerie sont mis à disposition du chirurgien moyennant une très modeste réversion d’une infime proportion de ses honoraires sans comme mesure avec ce qu’il devrait investir dans le privé.

Chacun a fait l’expérience d’attendre plusieurs heures dans la salle d’attente d’un médecin réputé, pour être reçu 5 mn et s’être vu réclamé des honoraires, disons .. conséquent, honoraires qui devrait être selon la formule consacrée appliqués avec tact et discernement .Cela pose question même si je sais que le conseil de l’ordre affirme veiller à l’éthique en la matière.

La réputation justement ! Qu’est ce qui fait la réputation d’un médecin ? Le bouche à oreille bien sûr, la compétence aussi, mais à y regarder de près, ce n’est pas le plus important .Un ami m’a dit un jour si tu veux réussir ton installation, (à l’époque j’exerçais à temps partiel dans le privé), met du marbre dans l’entrée. L’expérience montre que les critères de jugement de la patientèle ont peu à avoir avec la compétence du médecin : un cabinet luxueux, un secrétariat sont des préalables. Ensuite l’apparence du professionnel, bien fait de sa personne, élégamment habillé, un ton ferme et sûr de lui, impressionneront favorablement. Sans oublier un beau bureau design ou antique , avec quelques diplômes affichés au mur , et l’indispensable photo de la petite famille négligemment mais opportunément orientée vers l’impétrant .Un cérémonial d’accueil bien orchestré tout en rondeur et civilité , et l’indispensable stylo « mont blanc »pour rédiger l’ordonnance sur du papier vélin.

Il y a un livre, qui démonte parfaitement tous ces fonctionnements c’est Knock, de Jules Romain admirablement crée en son temps, par Louis Jouvet.

De leur côté les livres comme ceux de Soubiran ou de Slaughter , les films les médias la presse véhiculent une eschatologie complètement erronée .

Et moi dans tout ça me direz-vous ? Moi, pour commencer je n’avais pas la vocation ; j’ai déjà relaté comment fortement littéraire dans des sections scientifiques, mes enseignants me destinaient à une carrière dans ce sens. C’est mon père qui a décrété que je devais faire médecine .J’ai accepté à la condition de ne présenter le concours qu’une fois, après je ferai ce que je veux. le destin a voulu que je fusse reçu du premier coup .Pourtant je dois reconnaître que même si je ne suis pas du milieu médical,( mes parents sont enseignants) , j’ai joui des conditions matérielles nécessaires à la réussite de ma carrière puisque j’ai présenté et obtenu l’internant et que je suis spécialiste(mais je n’ai jamais suivi de « conf ») .C’est après que la vocation est venue , si l’on peut dire . Mais je me suis toujours senti un peu comme un étranger à ce milieu, c’est pour cela qu’on m’a souvent traité de médecin atypique, et même dans les dernier temps de docteur House, ce qui n’est pas pour me déplaire .A cet égard je vous soumet une petite anecdote : si vous avez suivi quelques épisodes de la série « dr house » vous avez remarqué qu’il ne porte pas de blouse ; de la même façon, aux Antilles je n’en portait pas . Un jour le directeur de la clinique est venu me voir et m’a dit : quand même, docteur vous devriez porter une blouse, ça ne fait pas très médecin. Je lui ai répondu : c’est précisément pour ça que je n’en porte pas ! J’ai opté pour le service public et je n’ai jamais pratiqué le dépassement d’honoraire. Ainsi je suis complètement détaché du rapport marchand .Cette semaine une des secrétaires m’a taquiné sur le fait que ma clientèle n’était pas disciplinée en comparaison de celle d’un médecin du privé qui assure des vacations dans le service que je dirige. Je lui ai fait remarquer que ma clientèle était très populaire et que c’est précisément celle-là qui m’intéressait .C’est au contact de cette humanité souffrante, et souvent socialement déshéritée que ma vocation s’est développée .C’est aussi cette pratique qui me fait m’interroger aujourd’hui, et quand on me demande si j’avais la vocation pour embrasser cette carrière, je réponds : « maintenant, oui ».

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